Camp de bucherons de la Haute-Mauricie.
L’histoire de l’agglomération de La Tuque est étroitement liée à celle des bucherons et des draveurs sur la rivière Saint-Maurice. Le bois représente un revenu important pour les exploitants forestiers et un gagne-pain irrésistible pour les travailleurs du coin qui, l’hiver, sont nombreux à quitter femmes et enfants pour « monter dans le bois ». Si l’expression est encore aujourd’hui d’actualité, les raisons de « monter dans le bois » sont multiples que ce soit pour le quad ou la pêche sportive.
L’Hôtel Leclerc et son commerce forestier vers 1906.
Dès 1830, les camps de bucherons se multiplient entre Matawin et Rivière-aux-Rats où forêts et rivières ne manquent pas. De novembre à mars, contremaitres, cuisiniers, marmitons et bucherons y trouvent facilement de l’emploi. Pour se donner des forces, les hommes se nourrissent de lard et de soupe au pois, quelquefois accompagné de poisson ou de gibier. Le travail d’abattage, de dégrossissage et d’équarrissage est épuisant, mais le prix payé pour la coupe va jusqu’à 8 $ le mille carré, souvent cinq fois plus cher que partout ailleurs. Au printemps, le bois prend la direction des cours d’eau où les eaux de rivières gonflées à bloc transporteront le bois vers les usines à papier de la Saint-Maurice.
Pendant que les éclaireurs préparent la route, les charretiers – surnommés les skiddeux – chargent les billots sur des traineaux en direction des cours d’eau. C’est là que les draveurs entrent en scène. Le draveur – de l’anglais driver – sautillant d’un billot à l’autre s’assure qu’aucun embâcle ne soit créé sur la rivière, car le dynamitage s’avère une opération délicate qui projette souvent les billots dans toutes les directions.
Trempés jusqu’aux os, les draveurs pataugent dans une eau glaciale ; plusieurs ne savent pas nager. Heureusement, il y a la gaffe, cette longue perche de 3,6 mètres de long (12 pieds) dont le bout est muni d’une pointe de fer servant à pousser le bois et d’un crochet pour le tirer. Au plus fort de cette épopée, trois saisons par an, plus de 3 000 draveurs et cageux descendaient ainsi la pitoune – dérivé de Happy Town – dans les eaux souvent agitées de nos rivières.
Pour s’approvisionner ou quand venait enfin l’été, les bucherons – la plupart cultivateurs et ouvriers – redescendaient à La Tuque. C’est là, près du chemin de fer, que les attendait Léonidas Leclerc. Dès 1906, l’Hôtel Leclerc et son commerce forestier, où Léo entassait son « grément » à vendre, bourdonnaient d’activités. L’hôtel était souvent rempli de musique et d’éclats de rire. Félix Leclerc y naitra en 1914 et y passera les premières années de sa vie. On dit que son grand-père Nérée, un conteur né, faisait jadis la tournée des chantiers pour divertir les travailleurs. La pomme ne tombe pas loin de l’arbre!
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